Alors que pendant de nombreuses années voire des décennies, la France (ou plutôt les gouvernements français) a vécu au dessus de ses moyens, l’heure du bilan et des comptes a sonné.
Dans des conditions financières similaires et compte tenu de la réglementation en la matière, une entreprise de droit privé n’aurait pas eu droit à un quelconque « repêchage » et aurait directement déposé son bilan. Un particulier, lui, aurait été conduit vers une procédure de surendettement voire de faillite personnelle. Il n’en est pas de même pour notre Etat souverain.
Cette situation nous rappelle, ô combien l’avons-nous oublié lorsque nous allons (ou non) voter, que l’Etat c’est nous.
Le gouvernement Fillon, par son plan de réduction des déficits présenté en Août dernier, nous demande non seulement de faire preuve de solidarité par ses mesures de rigueur mais surtout de faire preuve d’une gestion équilibrée dont il n’a jamais appliqué les principes. Encore et toujours, c’est nous qui payons au final. Par nos impôts en premier lieu et de nouveau par de nouvelles contributions créées pour combler les déficits exorbitants creusés depuis des décennies.
L’argent de la collectivité est fongible. Il n’existe pas une seule journée par laquelle nous apprenons que nos chers, très chers gouvernants, sont liés directement ou indirectement à des affaires financières diverses (emplois fictifs, retro-commissions, marchés publics, etc….) sans parler des retraites « spéciales » votées par nos chers parlementaires qui, tous bords politiques confondus, sont au moins d’accord sur un point : garder leurs privilèges pendant et après leur exercice.
La monarchie a disparu mais elle a laissé la place à une fausse démocratie dont les rouages financiers font repenser aux temps médiévaux où les paysans et les vassaux versaient leurs contributions aux seigneurs qui les dépensaient à leur gré.
Nous pourrions également parler de la « fiscalité de la route » qui s’est accrue pour des raisons officielles de sécurité, de l’augmentation des amendes, des boissons alcoolisées, du tabac, des timbres, du gaz, de l’électricité….
Le plan de réduction des déficits du gouvernement prévoit cette fois la taxation des plus riches et la hausse de certains prix à la consommation (tabac, alcool, boissons sucrées) pour tout le monde ainsi qu’un nouveau coup de rabot sur les niches fiscales.
Afin de respecter les engagements pris par la France (un déficit public égal à 3% du PIB en 2013), le Premier ministre François Fillon doit trouver 12 milliards d’euros (1 milliard en 2011 et 11 milliards en 2012) d’économies avant fin 2012 sans toucher aux revenus des ménages, ni compromettre la croissance.
Un exercice difficile dont les mesures principales sont les suivantes :
1 / Contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus
Les contribuables les plus riches devront s’acquitter d’une taxe de 3% à partir de 500.000 euros de revenus annuels. Cette contribution exceptionnelle et symbolique sur les très hauts revenus prendra fin lorsque le déficit public sera retombé à 3% du PIB (en théorie fin 2013). Elle risque d’être aussi temporaire que la CRDS qui perdure toujours…
2 / Hausse de 1,2% des prélèvements sociaux sur les revenus du capital
Les revenus du patrimoine (intérêts, dividendes, plus-values, produits d’assurance vie, revenus fonciers…) seront soumis à un taux de prélèvements sociaux de 13,5% contre 12,3% actuellement.
Après avoir taxé les revenus (IRPP) du travail et le patrimoine (ISF), il ne restait plus grand-chose à faire sinon que d’augmenter les taxes existantes.
3 / Hausse des prix du tabac, de l’alcool et des boissons sucrées
Le gouvernement vient de relever le prix du tabac de 6% en d’octobre, puis le fera à nouveau de 6% en 2012. Il a été également proposé d’augmenter la fiscalité sur les alcools forts (de l’ordre de 90 centimes par litre pour les boissons titrant 40°), le vin, le rhum et les productions régionales n’étant pas concernées.
Une nouvelle taxe sur les boissons sucrées serait créée. La mesure vise en particulier les sodas, facteurs de risque de l’obésité. Elle ne concerne pas l’eau, les jus de fruits sans sucres ajoutés ni les produits contenant des édulcorants.
4 / Application du taux normal de TVA (19,6%) aux entrées dans les parcs à thème
Le taux de TVA s’appliquant aux billets d’entrée dans les parcs à thème (Eurodisney, Parc Astérix, Puy du Fou…) sera relevé de 5,5% actuellement à 19,6%. S’amuser reviendra désormais plus cher.
5 / Coup de rabot de 10% sur les niches fiscales
Un nouveau coup de rabot de 10% s’appliquera sur les niches fiscales déjà visées dans le budget 2011. Le secteur de l’immobilier sera particulièrement concerné, notamment les investisseurs achetant des logements neufs pour les louer. Le taux de la réduction Scellier pour les bâtiments basse consommation (BBC) chutera de 22% en 2011 à 16% en 2012 (au lieu des 18% prévus initialement). Il s’appliquera sur la déclaration d’impôts sur les revenus de 2012, payable en 2013.
Parmi les mesures de réduction des niches fiscales, figure aussi la modification de la taxation des plus-values immobilières hors résidence principale. Le plan prévoit la suppression de l’abattement de 10% par an sur les plus-values immobilières réalisées lors de vente de résidences secondaires, logements vacants, biens locatifs ou terrains à bâtir. Désormais la plus-value sera calculée en fonction du prix d’achat, seulement majoré de l’inflation constatée depuis la date d’acquisition.
6 / Heures supplémentaires
Les allègements de charges sur les heures supplémentaires seront plafonnés pour les entreprises (elles seront intégrées dans le calcul des allègements de charges sur les bas salaires). Les salariés continueront néanmoins de bénéficier de la défiscalisation des heures supplémentaires.
7 / Parmi les autres mesures
Le plan anti-déficit comprend par ailleurs :
- Une modification des règles en matière d’impôt sur les sociétés, avec notamment la limitation du report des déficits dans le cadre de la convergence franco-allemande.
- La suppression de l’abattement de 30% sur le bénéfice imposable des entreprises dans les départements d’Outre-mer.
- L’alignement sur le droit commun des cotisations sociales du secteur de l’énergie.
- La révision du barème de la taxe sur les véhicules de société en cohérence avec le Grenelle de l’Environnement (les véhicules les plus polluants seront taxés davantage).
- La suppression de l’exonération partielle de taxe spéciale sur les conventions d’assurance des contrats de complémentaire santé « solidaires et responsables », qui subiront désormais le taux de droit commun de 7%.
- La suppression ou la réduction des dérogations en matière de CSG, dont :
- Application dela CSGau complément du libre choix d’activité (CLCA), une prestation familiale versée aux parents s’arrêtant de travailler pour s’occuper de leurs enfants ;
- Suppression de l’abattement pour frais professionnels pour les revenus qui ne constituent pas du salaire ;
- Réduction de l’abattement forfaitaire pour frais professionnels de 3% à 2%.
- La hausse du forfait social de 6% à 8% (forfait s’appliquant notamment sur les sommes versées par les employeurs à leurs salariés dans le cadre de l’épargne salariale).
- Un effort supplémentaire de réduction des dépenses de l’Etat en 2012.
Tout le monde à contribution
Selon François Fillon, ces mesures portent à 83% sur « les détenteurs de patrimoine, les grandes entreprises et les ménages aux revenus très élevés ».
Il n’empêche : la taxation de 3% des plus hauts revenus ne devrait rapporter « que » 200 millions d’euros. Et plusieurs des mesures annoncées toucheront l’ensemble des ménages, y compris les plus modestes. C’est le cas notamment de la hausse du prix de l’alcool, du tabac et des sodas (1,1 milliard de recettes au total), même si elle est légitimée par des objectifs de santé publique. Moins drastique que les plans adoptés par plusieurs de nos voisins européens (Grèce, Portugal, Espagne, Italie…), le plan Fillon est donc bel et bien un plan de rigueur.
Quelques niches fiscales échappent toutefois à l’austérité comme par exemple le prêt à taux zéro plus (PTZ+), réservé aux primo-accédants, les aides fiscales favorisant l’emploi de personnes à domicile ou encore le taux réduit de TVA dans la restauration.
Toutes ces mesures sont actuellement en cours de discussion au Parlement. Elles sont donc susceptibles d’être modifiées… à la baisse comme à la hausse.
Bravo à cette France que nous avons laissé dériver au gré des élections auxquelles nous brillons tous par notre présence ou notre absence mais à l’issue desquelles nous finissons par payer la mauvaise gestion d’une minorité intelligente dont les ministères ne semblent pas souffrir trop de la crise.
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